vendredi 1 mai 2009

Coimata (Prononcez Coïmata)


Résumé de la semaine du 23 au 29 mars... (en ce début mai, il n'est jamais trop tard).

Le 23 mars est une date important tant au niveau de l'AF (donc du côté professionnel) que du côté culturel. Et oui, il faut savoir que le 23 mars, nous avons donc commencé une nouvelle session de cours, un nouveau niveau pour moi et la concrétisation enfin, du projet de module de perfectionnement de phonétique. Ca, c'est donc côté AF et côté Cultura Boliviana, le 23 mars est le jour de la Mer. ET oui, malgré l'absence de quelconque côté marine, la Bolivie célèbre la mer. Pourquoi donc ? Et bien voilà, il s'agit en réalité de la commémoration de cette date tragique du 23 mars 1879, date à laquelle le pays perd son seul accès à la mer. Le département d'Antofagasta tombe aux mains des Chiliens lors de la guerre du Pacifique. Ce jour est donc semi-banalisé et donne lieu à des défilés militaires.



La semaine passe donc chargée de boulot mais vient alors le dimanche, jour de paix et tranquilité. Nous nous enfuyons avec Clémentine à la campagne. Direction Coïmata : le trufi nous amène jusqu'à Tomatitas mais de là, il reste bien 5 km. Nous commençonc donc à marcher en levant le pouce lorsqu'une voiture arrive et au bout de 200m, bingo. Certes, ils ne nous amèneront pas jusqu'au bout mais un couple d'une soixantaine d'années est ravi de faire notre connaissance le temps d'un kilomètre ou deux. Nous poursuivons à pied, le soleil chauffe (et brûle) nos épaules, l'appareil à la main, je me délecte des couleurs vertes et des fleurs toutes présentes pour saluer notre passage. Un peu plus loin, une autre voiture nous prend et nous amène à Coïmata, pause déjeuner dans un troquet et direction le fameux lieu dont on nous parle depuis le début de notre séjour à Tarija. Et bien, pas déçues : nature, verdure et une énorme cascade où les gens viennent se baigner... Nous nous éloignons un peu pour profiter au mieux de ce calme avec quelques chèvres...





Puis, après une sieste au bord de l'eau, et une trempette des petons, nous revoilà en route et direct, un gars nous prend et nous serons même accompagnées par d'autres "gringas" (étrangères) comme nous : une anglaise et une danoise, elles aussi en stage à Tarija. Le week-end s'achève autour d'un verre en terrasse en compagnie de notre camarade suisse Guy !

2ndo encuentro del Arte y del Vino



Minibus tout droit importé du Japon !
En poursuivant sur le chapitre vin, nous sommes donc fin mars, et le temps des vendanges est là. A cette occasion, la Valle de la Concepcion et la municipalité d'Uriundo organise un festival alliant l'art et le vin. Au programme : des artistes boliviens, chiliens et argentins se prêtent au défi de créer sur une semaine des oeuvres en lien avec le... vin, bien sûr si vous suivez bien ! Sculptures, peintures mais aussi courts-métrages.

Nous nous y rendons donc le samedi soir pour assister aux résultats du concours de courts-métrages (pas d'une qualité incroyable, mais bon...) mais le plus drôle nous attendait plus tard : un défile de tops modèles internationales (comprenez qu'il y en a une qui vient d'Argentine, hahaha). Les filles défilaient donc en tenue d'ouvrier mais sexisées : maillots de bain en-dessous, et perchées sur des talons. Selon le présentateur, on asssitait à l'alliance du ciment et de la beauté ! Quelle blague !


Mes camarades : Pati, Kikita, Silver, Doris et Clémentine

Petite fille avec le costume traditionnel de chapaca (région de Tarija)

Le lendemain, rebelote mais en journée cette fois, histoire de faire un tour à la campagne. 45 min de trufi (minibus), un tour dans le patelin et une mangeaille dans un troquet du village, qu'il est doux cet air de fin d'été, ce petit vent qui souffle sur les vignes orphelines de leurs plus belles grappes... Respirez, savourez et buvez ! Héhé !

Menu du jour : soupe à la cachuète et au riz, un "picante" de poule, des côtelettes et de la Chicha de uva (alcool à base de raisin)

Cholitas vendeuses de raisin


mercredi 8 avril 2009

Vins boliviens


Voici quelques détails extraits du Lonely Planet Bolivie.

« La région de Tarija s’enorgueillit d’être l’une des plus élevées du monde viticole. Les vignes, introduites par des missionnaires au XVIIème siècle, poussent en effet à une altitude située entre 1900 et 2100m, et à seulement 22° au sud de l’équateur. En conséquence, les raisins mûrissent plus vite qu’au niveau de la mer (parce que l’atmosphère y filtre moins les rayons du soleil), ce qui facilite dès le début le processus de maturation et la garde du vin.

Les cépages utilisés sont principalement du muscat d’Alexandrie et des cépages californiens, mais les viticulteurs boliviens tentent désormais de mettre en place un nouveau concept en définissant l’identité propre du vin bolivien. Ils se retrouvent donc face à un dilemme : doivent-ils essayer d’imiter le goût et le bouquet des vins français, de produire à grande échelle comme en Californie, ou se rapprocher plutôt de leurs voisins, les vins très estimés du Chili ? Afin d’avoir quelques éléments de réponse, nous sommes allés rendre visite à deux viticulteurs très différents dans la vallée de Concepcion.


Le premier établissement, l’un des meilleurs de Bolivie, appartient à la famille Pineda : la Bodega La Concepcion. Les Pineda sont unanimes : aucun exemple n’est à suivre. Au contraire, d’après Sergio Pineda, le vin devrait « refléter le caractère propre de la Bolivie ». Leur vin le plus primé, Cepas de Altura n’est pas mûri en fût de chêne ou d’autre bois, mais il n’en est pas moins étonnamment délicieux. Comme le dit Sergio lui-même : « c’est un vin à la fois pissant et subtil. Il n’y a pas besoin de l’accompagner de viande, d’olives ou de fromage pour qu’il révèle ses arômes. Il se suffit à lui-même. »



A la Casa Vieja, une bodega artisanale installée dans un ancien couvent jésuite vieux de 350 ans, la propriétaire, Doña Vita, est une personne affable qui nous a accueillis avec un grand sourire rehaussé de dents en or. « Nous avons commencé à faire du vin par accident, il y a 15 ans. Une personne qui devait de l’argent à mon père l’a remboursé en lui donnant plusieurs tonneaux. Ne sachant pas quoi en faire, nous avons cueilli le raisin qui poussait derrière pour le mettre dedans sous forme de vin et, depuis, nous n’avons plus arrêté ! » plaisante-t-elle en tapotant affectueusement ses tonneaux. Interrogée sur ce qu’elle pense du vin bolivien, elle répond : « Pour moi, le vin bolivien devrait rester simple et proche de la terre, comme le sont les gens d’ici. La vraie force du vin de Bolivie, c’est sa diversité. Il a un style bien à lui, comme les Boliviens eux-mêmes. »

Viva bodega !



Depuis les festivités du carnaval fin février, la vie s’était faite plus paisible voire un brin ennuyante… Boulot, boulot er repos le week-end. Faut dire qu’un week-end normal commence à 21h le vendredi soir et se termine le lundi matin à 7h donc les expéditions sont limités dans le temps et dans l’espace si on compte minimum 8h de bus pour s’évader… Donc, que faire ? Essayez de connaître les environs. La région de Tarija est LA région vinicole de Bolivie. Ils y font des vins d’altitude, ce sont les vignes les plus hautes du monde, à environ 2 000m.

Lors d’une de nos nombreuses pauses au Gattopardo, LE café de la place centrale, nous faisons la connaissance d’un français, François Thorez, ingénieur viticole et consultant pour la bodega Casa Grande ici. Il nous propose alors une visite guidée la semaine suivante. Rendez-vous est pris samedi 21 mars. C’est sur la route qui mène à Bermejo, à environ 15-20 km de Tarija que se trouve la bodega. Elle n’a que cinq ans et comme beaucoup ici, elle ne possède pas ses propres vignes, c’est plutôt une coopérative, ils achètent le raisin aux propriétaires des environs. Une fois sur place, François nous montre comment cela fonctionne : les raisins sont ramassés dans des caisses en bois, ainsi les merdes tombent et ne se retrouveront pas dans le processus de vinification. Les grappes arrivent sur une table de tri où de jeunes boliviennes retirent les plus abîmées.
Le raisin s’en ira ensuite reposer dans des cuves en métal pour fermenter. Afin de refroidir le liquide à l’intérieur des cuves, il existe un système de refroidissement : il s’agit d’une grande plaque creuse en métal qui traverse la cuve et dans laquelle passe de l’eau froide en continu.



Le truc, ici, en Bolivie, c’est qu’il n’existe pas tellement de réglementation à propos du vin et des cépages, ils font donc ce qu’ils veulent. On peut y voir du bon comme du mauvais : les puristes du vin français crieront au scandale car un vin d’appellation malbec ne peut contenir que 60% de ce cépage, quand en France la réglementation en réclame 80%... Mais on peut aussi y voir la possibilité infinie de création : d’un cépage moyen, on peut obtenir un bon vin « coupé », un assemblage inventif, l’option d’une nouvelle saveur jamais connue… C’est ça que vient chercher ici François Thorez, l’inventivité et cette liberté de création. Nous avons eu le privilège de goûter un Malbec en cuve depuis 15 jours seulement, un vin très nouveau donc et particulier dans la saveur mais aussi pour sa texture un peu épaisse. Sous nos yeux, il a procédé à ses fameux mélanges : un peu de ci, un peu de ça et tada. A 9 heures du matin, les vapeurs d’alcool et ses mixtures ont eu raison de mon crâne mais l’expérience fut intéressante.



De vins blancs passés, ils réaliseront du singani, un alcool typique d’ici, eau-de-vie de raisin distillée (40°) ou bien du brandy (équivalent du cognac mais qui ne peut avoir cette appellation car ne vient pas de cette région, héhé).
Cette fin de semaine sera placée sous le signe du vin. Et oui, en cette fin mars, fin de l’été, le temps des vendanges est bientôt venu et dans la vallée de la Concepcion où la vigne est reine, on célèbre la seconde rencontre du vin et de l’art. Un festival artistique où l’art et le vin sont associés tant dans les œuvres d’art que dans la gorge des artistes et des visiteurs du festival. On a pu entre autres assister à la présentation de divers courts-métrages mais le top de la soirée fut ce défilé de modèles internationaux… je cite « l’alliance de la beauté et du ciment » était présentée en ce que les jeunes filles défilaient en bleu de travail… haha.


lundi 2 mars 2009

Mon carnaval à Oruro

Enfin, sortir de Tarija, s’échapper quelques jours et aller découvrir d’autres contrés et pas des moindres et pas à n’importe quelle occasion… Nous nous embarquons ce vendredi après-midi du 19 février avec Clémentine pour le fameux carnaval d’Oruro, un des plus beaux avec celui de Rio. Après nous être arrangées avec le travail à l’Alliance, nous pouvons prendre le bus de 17h et nous arriverons donc là-bas, bien plus au nord de la Bolivie, et bien plus haut que Tarija (de 1800 m nous allons parvenir à plus de 3000 m) vers 8h du matin au terminal.

On nous avait prévenues, la ville n’a aucun charme, plutôt austère, je ne m’étale pas en détails mais nous ne sommes pas là pour ça mais bien pour faire la fête. Retrouvailles avec Lou, autre française déjà croisée quelques semaines plus tôt à Tarija, elle est accompagnée cette fois d’un australien, Scott et d’un anglais, David. Marcelo, élève de Clémentine à l’AF, nous avait conviées à célébrer le carnaval avec lui, et nous hébergeait donc chez sa grand-mère sur les hauteurs d’Oruro. Un petit déjeuner vite avalé dans la rue, un thé qui fait du bien, du pain et du fromage frais de vache, miam, ragaillardies, nous allons déposer nos sacs chez la « abuela » (grand-mère) de Marcelo, son cousin est aussi de la fête. Le décor est donc planté, certes, nous ne sommes pas boliviennes mais on le fera à la bolivienne, avec des boliviens et pas comme tous ces touristes qui ont pris d’assaut le terminal et la ville depuis quelques jours…

Carnaval oblige, Oruro en profite pour gonfler ses prix, il le faut bien, en dehors de l’année, les touristes ne courent pas les rues. Et, pour assister à la « entrada » (défilé du samedi), les places dans les gradins se monnayent. La place vaut 140 bolivianos (après négociations, vu qu’on était quand-même 20 !), soient 15 euros environ. Mais voilà, nous serons placés sur la Avenida civica, à la fin du parcours, là où c’est le plus large et où les danseurs seront le plus à même de danser, de faire leur chorégraphie, tout cela juste avant d’atteindre le point final, l’église de la Vierge Socavon. Oui, il ne faut pas oublier que le but du carnaval est avant tout religieux : les danseurs et musiciens après avoir parcouru les 2-3 km vont entrer à genoux dans l’église et vont y recevoir une bénédiction mais… à quelle heure ?

L’entrada commence tôt le matin vers 8h. Où nous étions nous, ils ont commencé à arriver vers 10h et nous étions en place. Je ne vous cache pas que j’ai mitraillé de photos (plus de 1 000, oui, je sais, j’exagère) mais vous comprendrez aussi quand je vous dirai que moi, je m’attendais à un défilé de 2-3 heures mais, non, non, non… ça a été du non-stop jusqu’à 7h30 le lendemain matin !!!! Je ne sais toujours pas le chiffre mais le nombre de groupes, de danseurs est impressssssioooooonnnnnant !!!! De quoi, devenir dingo ! Nous avons eu de la chance en plus car ce samedi, il n’a pas plu, le ciel était bleu et ce n’est pas pour nous déplaire puisqu’à côté de ces festivités pleines de strass, il y en a d’autres plus humides… Toujours ces bombes à eau et ces aérosols de mousse donc nous, touristes, nous sommes les premiers visés et malgré les ponchos sac poubelle-préservatifs géants qui sont vendus à tous les coins de rues, nous ne finissons pas très au sec.

Nous nous éclipsons tout de même à deux reprises pour aller manger et le soir, pas pour manger n’importe quoi : des rostros de oveja (« têtes de mouton »). Et là, je vois mes camarades se délecter d’un bout de joue, de la langue ou bien du cerveau de ces pauvres bêtes. Je ne fais pas ma fine bouche, je goûte un bout de joue mais voilà, le stand d’en face qui propose des sandwiches au poulet va plutôt gagner mon cœur, haha ! Je reste toutefois fascinée devant mes compagnons et leurs carcasses. Retour au défilé et nous y resterons jusqu’au petit matin, avec le soleil qui ne va pas tarder à se lever, les bières qui coulent toujours à flots dans les gosiers, le public descend bientôt des gradins et s’en va danser avec le cortège. L’ambiance devient folle, puis une fois terminé le parcours, tous les musiciens se retrouvent sur la place devant l’église et tous ensemble, ils continuent à jouer, c’est l’ « alba » (l’aube).

L’entrada touche à sa fin, il est temps pour nous de prendre un court petit déjeuner, histoire de ne pas se coucher le ventre vide. Il est 8h30, je peux fermer les yeux et rêver encore de strass, de paillettes, de fanfare, des danses, des costumes. Oruro, ce n’est sûrement pas Rio, la samba et les filles moitié nues mais c’est une autre musique, des gens toujours heureux de danser, des masques d’une qualité incroyable, tant de détails, des costumes beaux mais beaux, parfois inspirés du folklore passé : les incas, les peuples de l’Altiplano, la conquista espagnole, les populations noires du Béni, etc. Non, c’est sûr, Oruro n’a rien a envié à Rio, une agréable surprise et un souvenir pour la vie.

Le dimanche et le lundi ont été plus tranquilles : le dimanche, les groupes défilent de nouveau mais dans un ordre différent et dans un état différent (haha), plus bourré que la veille et à visage découvert. Le public partage le bitume avec les artistes et c’est alors un bordel incroyable. Pour remédier à tout ça, parce que ça entraîne du retard, des gros trous dans le cortège et que le spectacle n’est plus alors si prestigieux que la veille, l’organisation peut avertir les groupes de leur retard (via un drapeau bleu) et s’il y a trop de retard, ils peuvent être sanctionnés d’un drapeau rouge et là, alors cela signifie que l’an prochain, ils passeront les derniers du cortège ! Des petits groupes amis, aux costumes moins élaborés, plus dans le style de nos carnavals à nous, sont également de la partie ce jour-là.

Le lundi enfin, encore plus calme, même si quelques groupes d’irréductibles défilent encore à travers les rues et non plus selon le parcours prédéfini du samedi, nous en profitons pour déguster de la viande de lama (oui, oui), du charque de lama. C’est un plat typique d’Oruro : le charque (« tcharqué ») c’est donc de la viande de lama qui a été bouilli puis faite sécher au soleil avec du sel. Cela a une texture un peu sèche donc, et filandreuse. Avec cette viande, vous avez du maïs cuit (mais pas du jaune jaune comme chez nous, un autre type), un œuf dur et une pomme de terre cuite. Le tout se déguste avec les mains et l’assiette est enveloppée d’un sac plastique sur lequel est déposé la nourriture… Pourquoi donc ? Et bien, si vous n’avez plus faim, vous pouvez ainsi emporter ce qu’il vous reste ! C’est pas pratique ça ! Notre escapade à Oruro s’achève avec la visite de l’église et de son musée minier souterrain. Il est bientôt l’heure d’y aller mais évidemment, nous sommes en retard et nous nous retrouvons bloqués avec le taxi dans les rues encombrées par les danseurs et musiciens. Heureusement notre chauffeur est un pilote (bourré, on ne s’en apercevra qu’à la fin de la course bien sûr) et nous parvenons juste à temps au terminal de bus. Il est 19h, nous quittons Oruro pour regagner Tarija le mardi matin vers 7h. Le temps est gris, le cœur n’est plus trop à la fête… jusqu’au soir, haha !

Nous clôturerons cette édition du Carnaval 2009 à Tarija en compagnie d’amis boliviens : petite balade en voiture dans les rues afin de nous venger de toutes ces bombes à eau reçues ! C’est notre tour cette fois ! Une bassine pleine de « globitos » sur la banquette arrière, chacun à sa fenêtre et vlam, vlam, teins prends ça ! haha. Bon, moi, jamais très douée mais j’ai quand même fini par en avoir un, en plein dans le dos !!!


Les photos sont en ligne ici et ici (en accès libre, pas besoin de s'inscrire), en attendant que j'illustre les billets correctement.

Carnavaaaaaaaaaal d’Orurooooooooooooo- Quelques infos toujours (Lonely)



Le Carnaval d’Oruro est devenu la fête annuelle la plus renommée et la plus importante de Bolivie. C’est un moment idéal pour visiter cette ville minière un peu hors du temps, qui est alors le centre du pays. A première vue, ces festivités peuvent être décrites comme une reconstitution du triomphe du bien sur le mal, mais elles mêlent tant de mythes, de fables, de divinités et de traditions indiennes et chrétiennes qu’on ne peut les réduire à une explication si simpliste.


Les origines d’une fête similaire remontent au royaume médiéval d’Aragon (aujourd’hui une province espagnole), mais les Orureños (habitants d’Oruro) affirment que leur fête commémore un évènement survenu peu après la fondation de leur ville. Selon la légende, un voleur appelé Chiruchiru fut une nuit sérieusement blessé par un voyageur qu’il tentait de détrousser. Prise de pitié pour le malfaiteur, la Vierge de Candelaria l’aida gentiment à regagner sa maison, près de la mine située au pied du Cerro Pié del Gallo, et le secourut jusqu’à sa mort. Lorsque les mineurs le trouvèrent, une effigie de la Vierge était suspendue au-dessus de sa tête. Aujourd’hui, la mine porte le nom de Socavon de la Virgen (grotte de la Vierge) et une grande église, la Santuario de la Virgen del Socavon, a été érigée pour abriter la statue. La Virgen del Socavon, son nom actuel, est la patronne de la ville. Dans le spectacle présenté durant le carnaval d’Oruro, cette légende est associée à l’ancien conte uru de Huari (ville de la région) et à la lutte de l’archange Michel (San Miguel) contre les sept péchés capitaux.


L'église du Socavon



L'archange Michel



Les cérémonies commencent plusieurs semaines avant le carnaval même, par un serment solennel de fidélité à la Vierge, dans le sanctuaire. A partir de cette date, diverses processions aux flambeaux et des groupes de danseurs animent les rues de la ville.


A côté des danses boliviennes traditionnelles, telles que les caporales, les llameradas, les morenadas et les tinkus, le carnaval d’Oruro se caractérise par la diablada (danse des démons), où les danseurs revêtent des costumes extravagants. La création et la fabrication de ces costumes constituent désormais une forme d’art à part entière à Oruro. Plusieurs clubs de diablada, qui rassemblent des citadins de tous les milieux sociaux, sont financés par des entreprises locales. Ces groupes comptent entre 40 et 300 danseurs et leurs costumes peuvent coûter plusieurs centaines d’euros pièce.




Comme c'est écrit sur son chapeau, lui, c'est un caporal (on le reconnaît aussi aux grelots sur ses bottes). Ici, il est noir, référence aux esclaves noirs qui étaient anciennement présents au Béni (Nord de la Bolivie).




Ce danseur-ci fait partie de la Morenada. Ce sont les costumes les plus volumineux du défilé.




Un petit danseur tinku (l'inspiration y est plus folklorique).




Et une danseuse d'un groupe de llameras (c'est ceux qui ont un petit lama dans les mains, en peluche, ou présent, brodé sur les vêtements).



Les principales festivités débutent le samedi précédant le mercredi de Cendres par une spectaculaire entrada (procession d’ouverture), menée par l’archange Michel, brillamment paré. Derrière lui, dansant ou marchant, viennent les fameux démons et une cohorte d’ours et de condors. Le maître des ténèbres, Lucifer, arbore le costume le plus extravagant, agrémenté d’une cape de velours et d’un masque richement orné. Deux démons paradent à ses côtés, dont Supay, le dieu andin du mal qui vit dans les collines et les puits de mine.




Les ours




Un condor




Une diablesse


Les démons




La procession est suivie par d’autres groupes de danse et des véhicules ornés de bijoux, de pièces de monnaie et d’argenterie (en souvenir des rites achura au cours desquels les Incas offraient leurs trésors à Inti, le soleil, lors de la fête d’Inti Raymi). Les mineurs font l’offrande du meilleur minerai de l’année à El Tio, le démon qui possède tous les minerais et métaux précieux souterrains. Viennent ensuite les Incas et un groupe de conquistadores, dont Francisco Pizarro et Diego de Almagro.


Quand l’archange et les démons arrivent au stade de football, ils entament une série de danses qui symbolisent l’ultime lutte contre le Bien et le Mal. Lorsque la victoire du Bien est manifeste, les danseurs se retirent dans le Santuario de la Virgen del Socavon à l’aube du dimanche et une messe en l’honneur de la Vierge consacre le triomphe du bien.


Une autre entrada moins spectaculaire a lieu le dimanche après-midi et les danses continuent le lundi. Le lendemain, Mardi Gras, est marqué par des réunions familiales et des libations de cha’lla, avec aspersions de biens temporels pour obtenir leur bénédiction. Le lendemain, on se rend dans la campagne alentour pour pratiquer le cha’lla en offrande à la Pachamama sur quatre formations rocheuses – le Crapaud, la Vipère, le Condor et le Lézard. L’alcool coule à flots dans la gorge des participants.


Le jeudi est un grand jour de fête, avec manèges et amusement général. Le samedi, des groupes de danses donnent une représentation finale dans le stade. Le dimanche, une procession d’enfants célèbre l’ « enterrement » du carnaval.

ORURO – Quelques infos.

Informations du Lonely Planet



De loin, la plus grande localité du sud de l’Altiplano, Oruro est une cité minière au climat rude, et, à bien des égards, la plus bolivienne des neuf capitales provinciales de pays. Dans cette ville étonnante, 90% de la population est d’origine indienne pure. Les habitants se surnomment eux-mêmes quirquinchos (tatous), du nom de la carapace utilisée pour fabriquer leurs charangos (instruments à cordes traditionnels). Les Orureños sont des gens au caractère trempé, francs et travailleurs, endurcis par les années de déclin de l’exploitation minière et les rigueurs extrêmes du climat.

Oruro, dont le nom signifie « où le soleil est né », s’adosse à une chaîne de basses collines riches en minerais à l’extrémité nord des lacs salés Uru Uru et Poopo, reliés par une rivière au lac Titicaca. Souvent dédaignée par les voyageurs, la ville compte d’intéressants musées, de bons restaurants et de nombreux sites à visiter aux alentours. Très pittoresque sur le plan culturel, elle possède un riche patrimoine de danses et de musiques, particulièrement évident lors des festivités débridées du carnaval, célèbre dans toute l’Amérique du Sud pour ses costumes somptueux et ses traditions complexes.


HISTOIRE
Fondée au début du XVIIème siècle, Oruro doit son existence à la chaîne de collines riches en minerais qui s’élève à 350 m derrière la ville et s’étend sur 10 km². Le cuivre, l’argent et l’étain qu’elle recèle forment toujours le fondement de l’économie locale.

Dans les années 1920, la florissante industrie minière de l’étain était aux mains de trois puissants magnats, dont Simon Patiño, un métis de la vallée de Cochabamba qui devint l’un des hommes les plus riches au monde. En 1897, Patiño acquit la mine de La Salvadora, une source d’étain inépuisable près du village d’Uncia, à l’est d’Oruro. La fortune de Patiño ne cessa de s’accroître et, en 1924, il contrôlait près de la moitié de la production d’étain du pays.

Casa cultural d'Oruro, ancienne demeure de Simon Pateño.


Fortune faite, Patiño émigra au Royaume-Uni, où il commença à acheter des participations dans les fonderies et les mines d’étain d’Europe et d’Amérique du Nord. Ainsi, la Bolivie exportait à la fois son métal précieux et ses bénéfices. La grogne publique se traduisit par une série de manifestations ouvrières et aboutit à la nationalisation des mines en 1952 et à la création de la Corporacion Minera de Bolivia (Comibol), gérée par le gouvernement.

Des décennies d’impéritie gouvernementale, la corruption et la faiblesse du cours mondial de l’étain conduisirent à la capitalisation (« fiscalisation », une variante de la privatisation) et à la dissolution de la Comibol au milieu des années 1980.

La plupart des mines de la région ont fermé, mais elles continuent d’être exploitées par des coopératives locales. Le gouvernement Morales cherche des investissements pour en rouvrir certaines, l’augmentation du prix des matières premières en garantissant la rentabilité. C’est aussi une démarche importante sur le plan symbolique, la richesse en minerais étant depuis longtemps un sujet de fierté nationale. Les Orureños sont également fiers que Morales soit originaire de leur province : il est né à Isallavi, un petit village aymara sur la rive ouest du lac Poopo, et a fait ses études secondaires à Oruro.